Lire est souvent un voyage.
Un livre nous emmène toujours quelque part.
Parfois il est caravane, faisant cheminer des poètes pour des rencontres.
Il n’est pas rare non plus de trouver des écrivains à bord d’un train ou d’un navire…
J’ai à peine cliqué sur ma souris pour vite trouver des exemples, je vous laisse le soin d’en trouver d’autres.
d’octobre 2002 à juin 2003, 12 écrivains se sont succédés pour un voyage maritime afin, à chaque escale, de partager des sensibilités, de donner à voir des espaces, de porter des regards multiples aux seuils des
portes d’Afrique en juin 2000, le train Litterature Europe avait emporté une centaine d’écrivains venus de 48 pays d’Europe, on peut trouver des carnets de bord comme celui de
Nicolas AncionLa
Boudeuse aussi dans son tour du monde avait emporté 12 écrivains et poètes à la rencontre des peuples de l’eau.
C’est en m’intéressant à ce voyage, en lisant le carnet de bord et en visionnant les films que j’ai trouvé à cette occasion la notion d’écrivain du bord.
Quel imaginaire je pouvais avoir de cet écrivain du bord ? Bien sûr je suis partie sur les traces d’un écrivain chargé de faire des croquis de mots du voyage, de remplir précieusement de chacune de ses rencontres avec des peuples et des terres des carnets pour servir de base à de futurs récits, romans et nouvelles, de tenir un journal de bord plus porté sur l émotion, l’analyse, le ressenti, le pris sur le vif…
Mais ce n’est pas ce que j’ai trouvé.
L’écrivain du bord ou dit de navire était une fonction dans la marine marchande.
J’ai ainsi trouvé un article de Josée Valérie MURAT qui nous fait part de ses recherches sur
l’écrivain de navire en méditerranée au 14ème siècle.
Son rôle est organisé par le droit maritime et des réglementations propres à certains territoires ( Marseille, Venise, La Catalogne, …) qui en font plus qu’un intendant et un témoin, un personnage essentiel du navire qui doit prêter serment car il est au cœur des conventions et de la vie du bateau, jusqu’à recevoir les dernières volontés d’un mourant. Cet écrivain n’est pas marin et il est le seul à pouvoir poser encre sur son livre à défaut de nullité. La tenue du livre est obligatoire.
On est un peu loin de mon premier imaginaire d’un écrivain-poéte pour être face à un homme de pouvoir aux côtés du capitaine dont il est très proche de par la fonction.
Pour autant il n’est pas si loin de la littérature ni du rêve.
Ainsi
Les mille et une nuits, conte arabe d’Antoine Galland Eugènes Destain et Charles Nodier :
« l’écrivain du navire enregistroit tous les ballots avec les noms des marchands à qui ils appartenoient. Comme il demandoit au capitaine sous quel nom il vouloit qu’il enregistrât ceux dont il venoit de me charger « ecrivez lui repondît il , sous le nom de sindbad le marin «
Et le précieux témoignage écrit d’un écrivain du bord a pu servir à d’autres bien après lui à refaire le voyage, comme celui de la tartane
la Conception, devenue épave…et de bien d’autres navires.
Sans compter que certains écrivains du bord avaient bien d’autres cordes à leur arc que leur seule honnêteté recherchée, ils pouvaient être également dessinateurs, aventuriers, curieux de tout….humains.